« Aussi loin que l’histoire remonte, cette Afrique à proprement parler est restée fermée aux échanges avec le reste du monde. C’est le pays de l’or, replié sur lui-même, le pays de l’enfance, qui, au delà du jour de l’histoire consciente de soi, est enveloppé dans la noire couleur de la nuit. » G.W.F. Hegel
« La raison dans l’histoire, Introduction aux leçons
sur la philosophie de l’histoire » p. 160.
L’Afrique, berceau de l’humanité, est un continent qui s’étend sur 30,3 millions de km² en intégrant les espaces insulaires, une population de plus de 1,2 milliard d’habitants (deuxième continent le plus peuplé après l’Asie) et représente 16,4 % de la population mondiale en 2016. Le continent est bordé par la mer Méditerranée au nord, le canal de Suez et la mer Rouge au nord-est, l’océan Indien au sud-est et l’océan Atlantique à l’ouest. L’Afrique est un continent qui rassemble quelques 2 500 ethnies réparties sur 54 Etats souverains.
Des ressources naturelles et humaines stratégiques :
L’Afrique occupe aujourd’hui une place stratégique du fait de ses ressources en matières premières et sa biodiversité. Le jeu d’intérêt est ouvert entre les grandes puissances mondiales notamment, avec l’entrée en scène des géants asiatiques que sont la Chine et l’Inde.
L’Afrique est un continent riche en ressources naturelles. A côté de ses ressources énergétiques, l’Afrique est riche en métaux très sollicités comme l’or, le diamant, le cobalt, l’uranium, le phosphate, et le fer. Ce secteur contribue à la diversification des activités économiques et industrielles et constitue une source de recettes et de devises pour les États. Compte tenu de la diversité des acteurs impliqués et l’importance des biens et services résultants de ce secteur, les retombées de l’exploitation minière en Afrique sont importantes pour l’économie mondiale. Mais les conséquences sont importantes sur l’environnement biophysique et humain en raison des modes d’exploitation des ressources minières.
Autres ressources : l’Afrique dispose d’un potentiel agricole et forestier (2ème massif forestier mondial). La présence de vastes plaines et plateaux arrosés par de grands fleuves ou par des précipitations abondantes et régulières devrait permettre une production plus importante. Pourtant, les rendements restent faibles en raison de la pauvreté des populations rurales et de la faiblesse des investissements.
Le continent africain n’a pas les ressources naturelles comme seul atout. Sa démographie est en passe d’en faire un « poids lourd ». A l’horizon 2050, la population en Afrique aura presque doublé par rapport à 2018, pour atteindre 2,5 milliards d’habitants, contre 1,25 milliard aujourd’hui. Et la tendance va se poursuivre. D’ici à 2050, plus de la moitié de la croissance démographique dans le monde – qui sera peuplé alors par 9,7 milliards d’êtres humains – aura lieu en Afrique, souligne le département économique et social des Nations unies dans une étude récente. Un continent qui, au moment des indépendances, était peuplé de moins de 260 millions d’habitants.
L’Afrique a également une population jeune qui croît rapidement et une classe moyenne de 300 millions de personnes, entrainant de nouveaux besoins de consommation.
Les grandes puissances à la conquête du marché africain :
L’Afrique est au cœur de toutes les convoitises de par sa richesse : Les grandes puissances y sont toutes présentes : les Etats –unis, la France, la Russie, le Royaume Unis, l’Inde et la Chine. Ce dernier géant bat le record des investissements dans le secteur minier qui suscite le plus de convoitise et conflits d’intérêts. La Chine est, depuis 2009, le premier partenaire commercial de l’Afrique et son principal bailleur de fonds, position antérieurement occupée par l’Union européenne. Autant dire que Pékin fait désormais partie intégrante de l’équation géopolitique africaine.
La stratégie d’influence chinoise repose sur le pragmatisme. Pas question ici de lier ses investissements au respect des droits de l’homme ou aux critères démocratiques. Pékin « revendique la solidarité des Suds, apporte cet argent qui manque cruellement et une coopération technique généreuse, en échange des richesses dont elle est avide pour financer sa croissance record », analyse la géographe et économiste Sylvie Brunel.
L’Inde, le Brésil, les Emirats arabes unis, l’Arabie Saoudite, le Qatar, l’Afrique du Sud, le Maroc sont également très présents et voient en l’Afrique un partenaire stratégique.
Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que les entreprises et fonds d’investissement du Golfe accélèrent leur stratégie de diversification sur le continent africain. Les pays du Golfe se sont engagés dans la plupart des régions africaines dans divers secteurs tels que les transports, les infrastructures, les télécoms, les mines, l’immobilier, la banque et l’agriculture.
Concernant le secteur de l’agroalimentaire, les pays du Golf ne possédant pas de terres arables suffisantes pour assurer leur sécurité alimentaire ont investi dans des terres cultivées en Afrique.
Conflits sanglants, extrémisme et déferlante migratoire :
L’Afrique est le continent où le nombre de victimes du fait des conflits armés est le plus élevé dans le monde. Les facteurs qui alimentent ces conflits sont de plusieurs ordres. On cite entre autres : L’accès à la terre et aux ressources naturelles (pétroles et produits extractifs). L’accès au pouvoir et de la gestion de ce pouvoir.
En dépit du développement économique et de perspectives de croissance encourageantes, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique Centrale ont été au cours des dernières années déstabilisées par des flambées de violence, la résurgence de conflits et la montée de l’extrémisme religieux. A cela s’ajoute également le terrorisme, ingérence extérieure, tensions indépendantistes, pauvreté, épidémies, guérilla et guerres civiles, immigration, piraterie maritime et trafic de drogue.
La situation conflictuelle en Afrique est toujours préoccupante, malgré des efforts fournis. En octobre 2015, sur seize opérations de maintien de la paix menées par l’ONU, neuf se situent en Afrique et, en mai 2016, sur dix « situations sous enquêtes » à la Cour pénale internationale, neuf concernaient l’Afrique.
Les facteurs d’insécurité sont variés et les États du continent ne parviennent pas à trouver la stabilité nécessaire au développement. Tout ceci est lié à des phénomènes tels que « les conflits internes, les rébellions locales renforcés par l’état de la crise économique mondiale, le taux démographique élevé et le réchauffement climatique. Ces éléments nourrissent les rivalités du partage des ressources naturelles et l’enracinement du terrorisme djihadiste. Les craintes sont grandes d’une alliance entre les groupes terroristes, laquelle représenterait un risque majeur pour la sécurité du continent. D’un autre côté on note le développement du crime organisé qui n’épargne pas l’Afrique où les organisations criminelles transnationales se sont implantées depuis une dizaine d’années, profitant de la faiblesse des États du continent pour se livrer à leurs activités illicites (drogues, trafic des armes), qui détruisent les économies et achètent de nombreuses complicités locales. Ces phénomènes représentent un défi considérable pour le continent africain qui jouera sans doute au XXIe siècle un rôle essentiel dans la stabilité mondiale.
Bibliographie : Pour aller plus loin:
- Camille Sari « Afrique, Machreq, Union européenne : la trilatérale du XXIe siècle » Editions l’Harmattan, Paris 2018.
- Eric Nguyen « Géopolitique de l’Afrique » Edition Studyrama, Paris, 2017.
- Georg Wilhelm Friedrich Hegel « La raison dans l’histoire : introduction à la philosophie de l’histoire » Paris , imprimerie Pocket, 2012.
- Philippe Hugon « Géopolitique de l’Afrique » Editions Armand Colin, Paris, 2016.
- Jean-Joseph Boillot et Stanislas Dembinski « Chindiafrique : La Chine, l’Inde et l’Afrique feront le monde de demain » Éditions Odile Jacob, Paris, 2014.
- Sylvie Brunel « L’Afrique est-elle bien partie ? » in Sciences Humaines n°225, avril 2011.